Laurent Jeannin

Passionné, méticuleux, perfectionniste et inspiré, ce chef patissier de talent donne à ses créations sucrées un supplément d’âme et d’esthétisme.

Laurent Jeannin, un personnalité complexe

Avant d’être un des plus talentueux pâtissiers français, Laurent Jeannin est avant tout une personnalité complexe.

Ce matin de mai, il arrive dans les cuisines du Bristol, le palace parisien aux trois étoiles Michelin, et s’émerveille tout haut de ce qu’il vient de voir. « Je suis passé devant le Grand Palais, ils ont fait un trompe-l’œil incroyable. » Au loin, ça crie dans les cuisines.

Ce chef patissier change d’humeur. « Sympa d’arriver au boulot et d’entendre crier. »

La fatigue le guette.

De l’avis général, c’est un  à part. Les membres de sa brigade l’affirment d’une seule voix : « Le chef patissier est soit du côté de la tradition, soit de la création. Laurent n’est pas restreint par un répertoire. Il est complet. »


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Laurent Jeannin, la génie de la pâtisserie

Autre trait de caractère qui force le respect d’un des membres de sa brigade : « Il ne dit jamais non lorsqu’on propose de faire un essai. Si le moule n’existe pas alors on le fait fabriquer pour pouvoir réaliser le dessert.

Lorsqu’il a une bonne idée, il met tout en œuvre pour la réaliser.

Pour moi, c’est incroyable, je n’avais jamais vu cela auparavant. »

Cette volonté d’acier, cette absence de limite l’emmènent évidemment loin.

Un directeur d’Air Liquide l’invite un jour à visiter un centre de recherches.

Laurent s’y rend pour rencontrer trois scientifiques qui travaillent sur l’azote. « Ils trempaient une plaque d’aluminium à l’aide de quatre fils de fer dans de l’azote et la plaque finissait par atteindre un point de non-adhérence.

Ainsi tout ce que vous mettiez sur la plaque ne collait plus.

Lorsque j’ai entendu cela, ça a été une évidence », poursuit Laurent Jeannin qui aussitôt pense dessert, création…

Quelques années plus tard, le Litchi en neige, meringue au parfum de rose, poire et citron est devenu l’un des desserts cultes du Bristol.

À regarder les œuvres pâtissières de ce chef patissier, on est forcé de se demander d’où viennent les idées ?

L’inspiration pâtisserie partout

De tout, de rien, une forme, un ressenti, une envie, un rêve, la nuit, le jour et la nature surtout.

Les cerisiers en fleurs au Japon, les feuilles d’automne dans les jardins parisiens mais aussi un disque en vinyle pour la Castanha caramélisée ou encore des pliages de papier tels que les réalisent les enfants pour le Chocolat Manjari en origami.

La vie en somme inspire Laurent Jeannin comme c’est le cas pour tous les artistes.

Mais enfin d’où peut bien venir un dessert tel que le Précieux Chocolat Nyangbo ? Comment décrire une telle œuvre ? Une sphère de chocolat noir ajourée laisse apparaître un sorbet doré à l’or fin sur une tuile croustillante garnie d’une légère mousse de chocolat du Ghana.

La sphère est le résultat du pur fruit de son imagination pense-t-il, jusqu’au jour où il découvre dans un cabinet de curiosités à Versailles, des sphères ajourées étrangement similaires à son dessert.

« J’étais abattu de voir que cela avait déjà été fait. »

On le rassure : « Les grands esprits se rencontrent toujours. »

Puis on le relance : « Et ce nouveau dessert au miel ? » « J’entends parler depuis longtemps des problèmes écologiques qui touchent les abeilles alors j’ai voulu créer un dessert en l’honneur de leur miel.

Dans l’assiette, on retrouve un couvain et des petites abeilles en sucre qui s’envolent au moment où l’on retire à table la coche en verre. »

Eh oui l’actualité est aussi source d’inspiration. Du jamais vu pour une pâtisserie.


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Un répertoire infini de la pâtisserie

Pour créer, il faut avoir de solides bases techniques que Laurent a acquises au fil de son apprentissage.

Là encore il possède un répertoire hors du commun.

Cet héro de la pâtisserie maîtrise la confiserie, la chocolaterie, le travail du sucre, les desserts à l’assiette, les entremets, la boulangerie…

Durant trois ans d’apprentissage à la pâtisserie Valade à Vichy, il apprend les bases du métier : « C’était à l’ancienne, on faisait tout, même notre praliné. »

Après avoir admiré dans un magazine une colombe en sucre moulé, il décide d’apprendre à le travailler.

Il se confie à son patron qui lui répond : « Petit, le sucre, ça sert à sucrer le café. »

Qu’importe, il se lance dans l’apprentissage du sucre.

Il faut imaginer les longues soirées, les week-ends entiers, passés à souffler ou tirer du sucre.

Bien des années après, à l’occasion d’un premier voyage au Japon, il décide d’apprendre à travailler la glace sculptée. « À 17 ans, j’achetais les livres d’Yves Thuriès et je regardais ces œuvres. Avant d’aimer la pâtisserie, j’ai aimé son esthétique. »

  1. Milk-shake à la fraise
  2. L’une des dernières créations du chef patissier : un hommage aux abeilles et à leur miel
  3. Sorbet pomme verte, citron vert et basilic

Les postes se suivent chez Fauchon, l’hôtel de Crillon, l’hôtel George v.

Le 1er mars 2007, il intègre Le Bristol Paris en tant que chef pâtissier. En 2009, le restaurant Épicure obtient la troisième étoile au Guide Michelin.

En 2011, Laurent Jeannin est élu meilleur pâtissier de l’année par le magazine Le Chef.

Meilleur pâtissier, grand créateur, excellent technicien, on pourrait prolonger les compliments à l’infini mais ce qui étonne le plus c’est sa ligne, très mince et élancée. Comment est-ce possible ? « Je me nourris avant tout du plaisir des autres. »