cuisson du homard bleu

L’été est là et vous pensez à tout sauf à lui dans l’assiette. À tort. C’est la meilleure saison pour le déguster. Encore faut-il maîtriser la cuisson du homard !

Pêche et prix et saison du homard breton

  • La pêche est particulièrement importante de mai à août car en cette période de l’année où l’eau se réchauffe, le homard est plus actif et il se nourrit davantage.
  • Aussi rentre-t-il facilement dans les casiers.
  • Avec 60 à 70 % des volumes capturés pendant les mois d’été, la conséquence est immédiate : les prix chutent.
  • La tradition nous le fait manger au moment des fêtes de fin d’année, lorsque les prix sont multipliés par deux.
  • Quelle hérésie ! Conséquence : on partage souvent le homard avec son voisin de table.
  • L’été tout change, y compris les recettes qui prennent un sérieux coup de jeune. Exit le homard thermidor ou à l’armoricaine. Le crustacé se décline en salade, sur des pâtes, en rouleau de printemps…

Au choix : chacun son homard ou un homard pour tous, tous pour un.

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Dégustez le homard en salade l’été !

Homard bleu ou américain ?

On parle couramment de homard breton comme de la truffe du Périgord. Or aucune de ces deux régions n’a la paternité de ces produits, ni même l’exclusivité. C’est un abus de langage.

  • Il convient de parler du homard bleu, autrement appelé homard européen, que l’on retrouve autant en Bretagne, en Normandie qu’en Écosse.
  • En l’occurrence, nous sommes allés enquêter du côté de la Basse-Normandie qui, avec la pêcherie anglaise de Jersey, assure 70 % des captures en France.
  • Le Cotentin pêche 190 tonnes de homard, et Jersey 225 tonnes, pour un total national de 600 tonnes.
  • La balance commerciale reste cependant déficitaire avec cinq fois plus d’importations que d’exportations.
  • La majorité des homards consommés dans l’Hexagone viennent du Canada et des États-Unis.

Il s’agit d’une espèce différente, Homarus americanus, dont la chair est, selon certains, moins fine. Le homard français, Homarus gammarus, vit sur la façade atlantique, du cercle polaire jusqu’au littoral marocain.

Les stocks de homard sont bons

Étonnament, la ressource se porte bien. On sait en effet combien la mer subit de préjudices depuis des décennies. Certains stocks de poissons comme le thon rouge ou la morue de mer du Nord sont en péril.

Côté homard, ça baigne. Les pêcheurs, soucieux de ne pas scier la branche sur laquelle ils sont assis, ont eu à cœur de préserver la ressource en mettant en place des restrictions de pêche.

Saison janv févr mars avr mai juin juil août sept oct nov déc
homard NON NON NON OUI OUI OUI OUI OUI NON NON NON NON

Certaines zones de reproduction entre Chausey et le plateau des Minquiers sont prohibées. Les casiers parloirs sont interdits car jugés trop efficaces. Le nombre de casiers par bateau est limité. La pêcherie gérée au mieux se veut donc durable avec notamment l’obtention pour le homard du Cotentin et de Jersey du label MSC (Marine Stewardship Council). Un écolabel certifiant à l’échelle mondiale des pêcheries en fonction de leur durabilité.

pêche au casier
homard : pêche au casier

Les trucs à savoir pour acheter un bon homard

Il s’achète toujours vivant. Sa taille doit être au minimum de 8,7 cm (soit 500 à 700 g). Elle se mesure de l’œil jusqu’à l’extrémité postérieure du thorax (la queue n’est pas comprise). Inutile cependant de vous promener avec votre double décimètre, vous ne trouverez pas sur les étals des spécimens plus petits. En général, les casiers permettent aux petits homards de ressortir. Enfin, si par mégarde, ils sont capturés, les pêcheurs les remettent à l’eau.

Avant d’acheter votre homard, prenez soin de le soulever afin de vérifier sa vivacité:

  • Il doit bouger le plus possible, signe qu’il est en pleine forme.
  • En revanche, si les pattes et la queue pendent, c’est mauvais signe.

Le crustacé a probablement passé beaucoup de temps en vivier. Cela joue sur la qualité du homard qui n’est pas nourri et vit alors sur ses réserves.

Outre la vivacité de la bête, vous pourrez voir s’il s’agit d’un homard qui a longtemps séjourné en vivier en observant des traces d’usure sur les pinces et les antennes, par ailleurs souvent cassées.

Mentions et charte qualité

Enfin, la mention « homard du Cotentin » assure des spécimens de qualité grâce à la pêche aux casiers, technique douce permettant de capturer des homards vivants sans blessure. La charte qualité interdit plus d’une semaine de vivier. Vous identifierez la provenance grâce à un élastique imprimé NFM (Normandie Fraîcheur Mer).

Plus il est fraîchement pêché, meilleur sera le homard. Par ailleurs, après cuisson du homard, il ne se garde pas. Sa chair délicate doit être consommée rapidement. La nature fait bien les choses car c’est rare avec le homard qu’il y ait du rab pour le lendemain !

Cuire un homard : l’expérience du chef

Deux élèves ont parcouru un long trajet, pour s’initier à l’excellence, pour apprendre à cuisiner et à maîtriser la cuisson du homard. Les rochers du Cotentin en recèlent de beaux spécimens, qui n’ont qu’à traverser la route pour se retrouver dans le vivier du restaurant Le Rivage. À la sortie du vivier, le bestiau a affaire à Anthony Riche, le chef, l’expert qui le jauge d’un coup d’œil : « Ses antennes sont longues, aussi longues que son corps. Parfait, c’est signe d’une grande fraîcheur. »


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Cuisson du homard vivant

Les élèves opinent du bonnet, recueillis et attentifs. Jusque-là, tout baigne. Mais les choses vont se gâter, et pour les âmes sensibles. Car le chef empoigne une brochette d’acier et paf, sans crier gare, empale la bête qui gigote, « pour que son corps ne se rétracte pas à la cuisson du homard ». Wouf ! Ça jette un froid. Franchement, y’aurait pas un moyen plus soft de le faire passer de vie à trépas ?

Apparemment non, il semble qu’il doit forcément être vivant au moment de passer à la casserole. La seule chose que l’on puisse faire pour abréger ses souffrances est de le placer une demi-heure auparavant au réfrigérateur, pour l’endormir doucement (le froid anesthésie).

Conserver le corail du homard

Passé cette épreuve gore, le cours est nettement plus riant. Le chef, sourire malicieux et regard en coin, se charge d’instaurer une ambiance bon enfant. Du four à vapeur haute pression, le homard ressort rouge orangé, cuit à point. La cuisson du homard à la vapeur a l’avantage de préserver toutes les saveurs du crustacé. Vient ensuite l’opération décorticage : d’un côté la chair, de l’autre les carapaces et un troisième petit tas pour les déchets non utilisables.

« Et ça, on en fait quoi, on le jette ? » Et un élève de brandir une espèce de truc noir verdâtre visqueux qui ressemble à du résidu de viscères. « Ça, c’est le corail, le meilleur du homard! explique Anthony. En principe, le cuisinier se le réserve. Cuit à point, le corail devient rouge. Mélangé à un beurre blanc, il donne aux préparations un goût iodé et une couleur rouge vif. »

Décortiquer un homard

Extraire la chair des pinces requiert une savante technique qu’ignoraient les stagiaires pourtant venus en voisins, roués à la préparation des coquillages et crustacés. La découpe est terminée et les tas disproportionnés : sur un homard de 800 g, seuls 200 g de chair sont effectivement consommables.

Mais les débris de carapace sont un trésor ! Mis à chauffer dans un faitout, ils vont peu à peu libérer des sucs merveilleusement parfumés, destinés à sublimer la sauce. Les sucs, ce sont ces pâtes brunes qui accrochent dans le fond que l’on doit gratter, gratter et décoller sans relâche. Dommage pour vous, lecteur(trice), vous n’avez pas l’odeur…

De ce jus de carcasse s’échappent alors des fumets diaboliquement tentants. Vous n’avez pas le bruit non plus… Celui – gling gling – des carcasses qui choquent les parois de la marmite, celui – pok pok – des œufs de homard qui éclatent à la cuisson, auxquels s’ajoute celui des haubans des voiliers qui tintinnabulent, dehors, sur la grève.

Recettes de homard

Il fait une chaleur de forge dans la cuisine, celle-là même où se mitonnent les plats du restaurant. Alors nos yeux indiscrets furètent en douce sur les étagères, notant la collection d’huiles parfumées du chef, son répertoire d’épices, ses trucs pour protéger les préparations avant de le stocker en chambre froide, ses astuces pour nettoyer facilement sa cuisine après le coup de feu…

Cuisson du homard 8
les sucs du homard dégage une odeur incomparable

Pour en revenir à notre recette, après avoir vigoureusement fouetté le sabayon, il faut ciseler le basilic. Ah ! le ciselage des fines herbes… Un grand classique qui épate et fascine toujours les élèves.

« Mais comment fait-il pour aller aussi vite, pour couper aussi finement les herbes, pour ne pas se couper la pulpe des doigts ? »

L’astuce consiste à garder les premières phalanges recroquevillées (à l’auvergnate ! diront certains) et à faire coulisser la lame du couteau sur la jointure.


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Place à la dégustation !

La faim/fin approche. Les fourneaux sont désormais colonisés par une armada de casseroles fumantes, bouillonnantes, grésillantes… Puis le dressage s’accomplit, une couche de ci, une lichette de ça, un zeste de sauce et sur cet échafaudage, le chef plante les antennes, mises de côté à cet effet.

« Si vous voulez bien passer à table… »

Croyez-vous que l’on se fît prier ? Après la première bouchée, on entendit ainsi Françoise s’écrier : « À la prochaine grande marée, j’essaye ! »

Alors à cette résolution sortie du cœur s’en ajouta une autre, celle d’aller se balader du côté de la pointe de La Hague ou des îles de Jersey et Guernesey, à un saut de puce de là, histoire de voir si l’on n’y dénicherait pas sous un rocher quelques homards en maraude.