Au bout du bout de la Bretagne, Brest est une destination encore peu prisée. Dynamique et gourmande, la grande ville du Finistère possède pourtant un sacré caractère, et se révèle très attachante.

Une ville clivante 

On l’aime ou on la déteste… C’est sûrement pousser le bouchon un peu loin mais Brest est clivante comme on dit aujourd’hui. Accros au soleil ou dingues de vieilles pierres, les sceptiques lui reprochent son climat chaotique ou sa reconstruction d’après guerre. Nous, on se place définitivement dans le camp des aficionados, et pour plein de raisons. On goûte justement sa météo vivifiante – il pleut moins à Brest qu’à Biarritz! –, cette architecture basse et claire, cet urbanisme aéré. Comme un balcon sur sa rade, Brest fait corps avec un environnement marin magnifique et possède le tempérament frondeur des cités portuaires.

Au long de ses quais, tout ce qui flotte est là : des cargos en provenance du monde entier, des voiliers de loisirs, des multicoques de course en attente d’un départ, des chalutiers côtiers, des navettes qui font la liaison vers l’île d’Ouessant, ou encore l’Abeille Bourbon, remorqueur parmi les plus puissants de la planète.

Quand elle ne fend pas les eaux de la Manche ou de l’Atlantique, la Recouvrance est amarrée ici aussi. Cette goélette fait la fierté de la ville, et pas seulement lors des fêtes maritimes, qui rassemblent des milliers de vieux gréements tous les quatre ans. L’arsenal déploie aussi une flotte imposante, sur la rade et dans la rivière Penfeld, dominée par la silhouette du château et le pont levant de Recouvrance. De là-haut, la vue impressionnante donne sur le plateau des Capucins et ses monumentaux ateliers industriels du xixe siècle récemment transformés en un formidable lieu de culture. Pour faciliter l’accès à ce nouveau quartier, on a tendu des câbles au-dessus de la Penfeld pour porter un téléphérique. Bref, récemment labellisée Ville d’art et d’histoire, Brest bouge !

Brest, une ville en mouvement

On l’adore pour son décor, sa « mise en scène », son ouverture sur la mer, son dynamisme, mais aussi pour son esprit. La convivialité de la plus grande ville du Finistère s’appuie aussi désormais sur son potentiel à régaler les gourmands. Le terroir local regorge de bons produits, de la mer ou de la terre. La rade, séparée du grand large par le fameux goulet de Brest, est un petit océan à elle toute seule, où les pêcheurs puisent des poissons mais aussi des coquillages comme la praire, le pétoncle noir ou la coquille saint-jacques, dont nombre de grands chefs affirment qu’elle est la meilleure de Bretagne. Les ostréiculteurs y élèvent des huîtres remarquables, à l’image de l’entreprise Keraliou, installée les pieds dans l’eau à Plougastel Daoulas.

Tour d’horizon

Ce Finistère-là regorge aussi de bons légumes et renoue avec un élevage de qualité, à mille lieues d’une démarche productiviste qui a fait – et fait encore – la richesse des mastodontes de l’agro-alimentaire breton. Ces matières premières, marines ou terriennes, fournissent du grain à moudre aux artisans et aux restaurateurs les plus exigeants. Derrière le comptoir de sa cuisine ouverte, Xavier Pensec, patron de Hinoki, magnifie les poissons en des sushis d’exception. Au Ruffé, on célèbre aussi les ressources autochtones dans le décor comme dans l’assiette, avec des convictions très ancrées en faveur des savoir-faire authentiques, d’une agriculture et d’une pêche durables.


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Au Globulle rouge, excellent bistrot, c’est aussi le marché qui commande une ardoise toujours en mouvement. Les appétits brestois profitent donc de la profondeur du terroir et des talents sachant le mettre en valeur. En ville, aux halles Saint-Louis, aux halles Saint-Martin comme sur les marchés, de nombreux commerces de bouche racontent aussi de savoureuses histoires. Hervé Nourry, patron de La Cave des vins gourmands, écrit un chapitre passionnant sur les vignobles hexagonaux. Chez Histoire de chocolat ou C. Chocolat, on vous cause « cacao », « ganache » ou « praliné » avec de très sérieux arguments à la clef. À Meat Couture, à la fois table et boucherie, on vous invite sur une planète viandarde d’une grande originalité, où la reine côte de bœuf est loin d’être la seule vedette du billot…

Vous l’aurez compris, on pourrait vous conter encore longtemps les mérites de Brest. Et grâce à la ligne à grande vitesse mise en service en 2017, Brest n’est plus qu’à 3 heures 30 de la gare Montparnasse.

3 bonnes adresses à noter pour bien manger à Brest !

  1. Le Globulle rouge  : « Autour » d’une cuisine vitrée, une très jolie gueule d’atmosphère bistrotière entre objets de brocante, vieux carrelage et Formica. Des produits bien choisis pour une cuisine du marché réinventée chaque jour ou presque.
  2. Le Ruffé  : Le goût et encore le goût! Cette table militante pousse loin la quête des meilleurs produits du terroir breton comme le porc blanc de l’Ouest ou le beurre de la vache froment du Léon. Des produits« élaborés » dans le respect de l’environnement, des hommes et des animaux…
  3. Meat Couture  : Une très singulière boucherie-delicatessen patronnée par Elena et Andriy Maximov, qui travaillent uniquement des carcasses entières. Prolongée d’une agréable terrasse avec vue sur le pont de Recouvrance, une superbe adresse pour les dingues de viande sur place ou à emporter.  Autour du billot central, des réfrigérateurs vitrés remplis de morceaux de viande parfaitement maturée provenant de différentes races. On trouve aussi de préparations bouchères épatantes et de charcuteries maison

Texte : Pierrick Jégu

Photos : Laurent Grandadam


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