
Quand manger des oranges sanguines, si riches en anthocyane ?
Sous son écorce qui la ferait presque passer inaperçue, cette orange dévoile une chair aux couleurs intenses, aux douces saveurs acidulées et aux bienfaits non négligeables.
Entre la mer turquoise et les reliefs vallonnés de Sicile, poussent sur de longues allées boisées des orangers qui font la renommée de l’île italienne. Ces arbres peuvent atteindre 10 mètres de haut et laissent un doux parfum dans l’air lorsque le vent méditerranéen souffle entre leur feuillage touffu et agite leurs petites fleurs blanches. Mais c’est au pied du volcan de l’Etna, dans les plaines de Catane, que s’épanouissent les oranges les plus réputées, parmi lesquelles, les singulières oranges sanguines. Sur cette terre volcanique, les orangers bénéficient non seulement d’un terreau fertile, formé de scories de lave et de résidus de volcan riches en minéraux, mais aussi d’un microclimat unique : les journées sont chaudes et les nuits fraîches. Ce sont ces variations de température qui permettent à l’orange douce de prendre des nuances rouge sang à violette. Cette coloration débute sous la peau pour gagner progressivement le centre du fruit. À l’extérieur, sur l’arbre, elles ressemblent à s’y méprendre aux oranges traditionnelles, mais un œil attentif saura déceler de légères différences : l’orange sanguine est plus petite, moins ronde et laisse apparaître sur son écorce de petits points rouges de tailles variables.
Pigment protecteur
À la découpe, le fruit dévoile une chair en forme de rosace. Ses quartiers sont tachetés de rouge, d’orange, de pourpre et de violet : un vrai kaléidoscope ! Cette particularité propre à l’orange sanguine provient de l’anthocyane, un pigment que l’on trouve aussi chez d’autres espèces de fruits rouges, comme les myrtilles ou les cerises, mais qui reste assez rare chez les agrumes. Ce pigment est réputé pour ses vertus antioxydantes qui lui confèrent un rôle protecteur face aux agressions extérieures. Cette accumulation d’anthocyanes serait le processus de défense propre aux oranges sanguines, pour se prémunir du froid qui survient la nuit. Plus le choc de température est important, plus la chair se pare d’un rouge intense.
Néanmoins, selon les variétés, les teintes diffèrent sensiblement. Parmi elles :
- la sanguinello, colorée et sucrée, arrive à maturité entre les mois de février et d’avril ;
- la moro, sa cousine, est très juteuse et offre des couleurs presque violettes ainsi qu’un goût acidulé. Elle est récoltée de décembre à février ;
- la tarocco, la mutation de la sanguinello, est certes moins colorée mais plus répandue sur les étals, de la mi-décembre à mai. (Ces trois variétés poussent aussi en Californie, en Afrique du Nord, à Malte ou en Espagne.)
- les oranges siciliennes sont protégées par une IGP, l’Arancia rossa di Sicilia, qui garantit une saveur unique et un mode de culture bien spécifique. Dans les provinces de Catane, d’Enna et de Syracuse, les oranges sanguines sont récoltées à la main pour n’abîmer ni l’arbre, ni le fruit tant apprécié des chefs… et des connaisseurs.
(Article publié dans le magazine Saveurs n° 271, 2020)