La fermentation existe depuis la racine de l’humanité . Ça interpelle, tant l’intérêt pour ce mode de transformation des aliments est nouveau. Ce qui a changé ? On mange fermenté en toute conscience. Des produits fermentés, aujourd’hui à la mode, comme le miso ou le tempeh (tous deux à base de soja), existent depuis des siècles. Les nutritionnistes nous vantent les bienfaits pour la santé de ces aliments fermentés. La nouveauté ? En boire aujourd’hui en France et non plus uniquement dans une yourte perdue au milieu des steppes. C’est la force de la mode : faire du nouveau avec de l’ancien. Mais cette dernière a du bon car elle nous fait réfléchir sur un procédé qui est omniprésent dans notre alimentation.

Les règles de la fermentation maison

  1. Choisir de préférence des légumes biologiques.
  2. Choisir des légumes frais et de bonne qualité : sans taches brunes et sans feuilles flétries.
  3. Utiliser du gros sel de mer sans additif. Les sels iodés, fluorés ou contenant des anti-agglomérants donnent un goût de tabac froid aux produits fermentés.
  4. Ne jamais utiliser d’eau chlorée. Si l’eau de votre robinet est chlorée, la faire bouillir et refroidir ou la laisser reposer à l’air libre dans une carafe pendant deux à trois heures.
  5. Travailler dans un environnement propre mais pas stérilisé. Il n’est pas utile de faire bouillir les bocaux. Il faut simplement bien les laver.
  6. Utiliser des bocaux bien hermétiques fermant avec un caoutchouc et un levier métallique.

Un usage planétaire

La plupart des produits laitiers, le vinaigre, le café, le thé, les charcuteries, les poissons saumurés, les viandes faisandées, les olives, les alcools sont fermentés. Il est difficile de trouver une culture qui ne connaîtrait pas la fermentation. Ne serait-ce que parce qu’il est difficile de trouver une seule société qui ne connaîtrait pas les boissons alcoolisées. Certains archéologues émettent même l’idée selon laquelle « les nutriments essentiels fournis par la fermentation des céréales ont permis aux Mésopotamiens de développer une riche civilisation. Dès l’instant où la bière est apparue, ils ont disposé de tout le nécessaire pour une croissance réussie. Cela expliquerait pourquoi la première grande civilisation est née dans l’Orient ancien », écrit Andrew Curry dans la revue National Geographic. Certains chercheurs affirment même que c’est la volonté de cultiver les plantes sauvages, destinées à la fermentation en vue de produire de l’alcool, qui auraient incité les humains à se sédentariser pour pratiquer l’agriculture !

La fermentation aux quatre coins du monde

Chez les nomades d’Asie centrale, où ne poussent ni fruits ni céréales, c’est le lait de jument qui est mis à fermenter. Un procédé que l’on retrouve dans de nombreux pays. Le kéfir que certains Occidentaux boivent désormais au petit déjeuner, est réalisé à base d’eau de fruit ou de lait, mélangé aux grains de kéfir, c’est-à-dire un amas de micro-organismes qui fermentent au contact des liquides dans lesquels ils trempent. Au goût, le kéfir de lait ressemble à un yaourt à boire comme le lait ribot, consommé en Bretagne.

L’ayran russe et l’ergo éthiopien sont à base de lait de vache, le chal du Turkménistan, le shubat du Kazakhstan, le khoormag de Mongolie sont tous trois préparés avec du lait de chamelle, tandis que le koumis est élaboré avec du lait de jument. Au Kirghizstan, c’est avec du lait de yak qu’on prépare le kourout. Il existe d’autres exemples d’un même produit décliné à travers les cultures culinaires. Nous connaissons la choucroute dans l’est de la France, les Coréens mangent du kimchi à base de chou et de piment, qui est au Pays du matin calme consommé quotidiennement et à tous les repas, à l’instar du pain chez nous. Ah tiens, le pain, parlons-en, c’est un aliment fermenté, tout comme le vin.

La fermentation, un exhausteur de goût naturel

La fermentation est un phénomène naturel que l’homme a appris à maîtriser. Lorsqu’on oublie un produit à température ambiante, il est de fait colonisé par des levures, des bactéries, des moisissures et il finit par fermenter. Produire du roquefort, c’est précisément utiliser ce phénomène de colonisation par de la moisissure dite « noble », en le maîtrisant pour en faire un produit de gastronomie. Une viande faisandée est également un phénomène naturel de transformation qui apporte du goût et de la tendreté, mais il convient de contrôler cette opération sinon on bascule dans une zone dangereuse. La frontière entre la fermentation et la pourriture est ténue. Cependant dans le premier cas, la saveur de l’aliment est décuplée.

Plus comme ça

En effet, plus qu’un moyen de conservation, la fermentation permet aussi de révéler le potentiel gustatif d’un produit. Le céleri en fermentant développe des arômes de fruits, plus spécifiquement d’agrumes. Que dire d’un jambon de Parme de plusieurs mois comparé à la cuisse qu’on cuirait simplement ? La fermentation est un véritable exhausteur de goût. C’est aussi un monde de textures : croquant, pétillant et même effervescent.

Tous les légumes peuvent être fermentés à l’exception de la pomme de terre.

On fermente également les céréales et les légumineuses. Cela permet de les rendre plus digestes.

Tester la fermentation à la maison

Si on trouve beaucoup de produits fermentés dans le commerce, il faut se lancer dans le fait-maison car certains aliments sont totalement absents comme les légumes ; même les cornichons sont aujourd’hui conservés dans du vinaigre et non plus fermentés comme autrefois. Il faut désapprendre tout ce qu’on nous inculque depuis l’enfance sur les microbes, la stérilisation, la congélation… Quand, dans un bocal de légumes fermentés, vous apercevez du moisi à la surface, vous l’enlevez et consommez le reste. Le risque d’intoxication est nul. En revanche, vos défenses immunitaires seront renforcées. Car la grande différence entre un aliment cuit et fermenté, c’est que la cuisson tue la vie qui est présente alors que la fermentation la démultiplie. Vie et fermentation sont presque synonymes, ce qui explique que l’un ne va pas sans l’autre depuis la nuit de temps.

3 différentes techniques de fermentation

À partir du XIXe siècle, Louis Pasteur et Louis Joseph Gay-Lussac ont été les premiers à réaliser des travaux sur la question. On distingue aujourd’hui plusieurs types de fermentation :

  • la fermentation alcoolique, réalisée avec des levures,
  • la fermentation acétique, qui correspond à l’oxydation de l’éthanol en acide acétique (vinaigre),
  • la lacto-fermentation ou fermentation lactique, réalisée avec des bactéries lactiques, qui sont des probiotiques, donc bonnes pour la santé.